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.Laissez, celles-là sont trop fleuries.Les roses thé seront pour vous, ce sont les plus belles.Vous les aimez ?Le bleu des yeux d’Annie devient humide.C’est sa manière de rougir…– Oh ! oui.Claudine.Comme vous êtes gentille !– Je ne suis pas gentille, mon enfant.Je trouve que ces roses vous vont bien, voilà tout.Elle prend de mes mains les roses que je lui tends, la tige en l’air, pour que les têtes lourdes des fleurs ne s’effeuillent.Elle se pique, s’embarrasse, voudrait parler… Je souris à son effort, mais je ne l’aide plus comme autrefois…– Comme vous êtes gentille, Claudine ! répète-t-elle.Je ne m’attendais pas à vous trouver ainsi.– Pourquoi ?– J’avais une folle crainte de vous revoir, une crainte lâche de voir votre chagrin, de vous surprendre pleurant… Rien qu’à cette idée-là, je me serais sauvée je ne sais où… Marthe m’a fait honte…– Marthe a toutes les délicatesses…Elle s’éclaire, ose me regarder en face.– Ah ! vous avez dit cela comme autrefois.Je suis contente !… Je suis si étonnée, Claudine, de ne pas vous trouver plus…– Plus triste ?Elle fait « oui » d’un signe, et j’esquisse le geste d’excuse de quelqu’un qui comprend son tort, mais n’y peut rien… Annie songe, en détachant d’une tige des épines roses arquées et dures, en formes de griffes de tigre… Elle prend un air de componction réservée pour demander enfin :– Où est la tombe de Renaud, Claudine ?De l’épaule, j’indique vers le couchant un point invisible – Là-bas, dans le cimetière.Et je sens que je viens de la scandaliser.La tombe de Renaud… cette miniature d’enclos cerné d’une grille peinte, dont la dalle blanche se salit aux pluies d’orage… C’est d’un cœur contraint et froid que je la soigne.Rien ne m’y attriste, rien ne m’y retient.Rien ne reste, là-dessous, de celui que j’aime, de celui de qui je parle encore, en mon cœur, en disant « Il dit ceci… Il préfère cela… » Une tombe, ce n’est rien qu’un coffre vide.Celui que j’aime tient tout entier dans mon souvenir, dans un mouchoir encore parfumé que je déplie, dans une intonation que je me rappelle soudain et que j’écoute un long instant, la tête penchée… Il est dans un court billet tendre dont l’écriture pâlira, dans un livre usé que flattèrent ses yeux, et sa forme est assise à jamais, pour moi, mais pour moi seule – sur ce banc d’où il regardait, pensif, bleuir dans le crépuscule la Montagne aux Cailles… À quoi bon parler ?– Prenez encore cette rose rouge, Annie.Marthe l’épinglera à son voile vert, sur sa robe safran.Elle la prend sans un mot.Une abeille passe follement et rase de si près sa bouche qu’elle recule, essuie ses lèvres du dos de la main…– N’ayez pas peur.C’est une abeille qui rentre.Elles ont leur nid là-bas dans un creux du mur éboulé…J’indique de l’épaule, comme tout à l’heure pour le cimetière, et le regard d’Annie me blâme encore… Je ne me fâche pas.Je me sens vieille et douce, devant une enfant qui ne peut pas comprendre…Hors des rosiers nains, ceux qui croulent sous des roses jaunes inodores, quelque chose de roux s’élance, bondit dans le soleil, fuse et disparaît… C’est une farce de ma Prrrou, la chatte rouge, ma sauvage, ma folle… Je ris tout haut du saisissement d’Annie :– Vous savez qui c’est, Annie ? C’est Prrrou.Et Prrrou, c’est la fille de Péronnelle !– Péronnelle ? ah ! vous l’avez toujours ?Ses prunelles redeviennent humides ; elle songe à l’année où elle s’enfuit de nouveau, me laissant Toby-Chien et la chatte grise…– Je l’ai toujours.Elle vieillit un peu et dort beaucoup.Elle a commis, entre autres méfaits, cette fille couleur de renard que je nomme Prrrou… La voyez-vous ?Entre deux branches d’acacia pleureur, une tête féroce nous guette, d’un roux léonin, avec des yeux d’ambre vert.On distingue le nez large, le menton avancé, les joues musclées comme celles d’un grand fauve…– Elle a l’air bien méchant, murmure Annie.– Assez méchant.Elle tue les poulets, écorche les matous, mange les oiseaux et griffe la cuisinière.Moi-même, je la capture rarement, mais elle me suit toujours à distance, même jusqu’aux bois.Elle se gare de tout et n’a peur de rien.Elle ressemble un peu à Marthe, n’est-ce pas ?– C’est vrai, acquiesce Annie, amusée [ Pobierz całość w formacie PDF ]

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